Cette installation sonore et photographique met en perspective et en partage des récits de l’installation de vietnamiens en Isère. Travailleurs forcés, étudiants, rapatriés, "boat people"... les parcours qui ont conduit des Vietnamiens à s’établir en Isère depuis un siècle sont multiples. Les paroles sont portées par des ambiances sonores où s’entremêlent, paysages sonores enregistrés au Vietnam, sur l’agglomération grenobloise, et témoignages du centre d’accueil de Cognin-les-Gorges bien sûr.
Composition - collectage : Raphaël Cordray ; Ethnologie - collectage : Benjamin Vanderlick ; Une production Microphone.
VIETNAMIENS D’ISERE
Les guerres et les présences coloniales, les luttes pour l'indépendance, la division puis la réunification du Vietnam, et leurs conséquences qui ont opposé le Vietnam à l’État français, puis aux États-Unis, ont mobilisé les opinions publiques des pays colonisateurs et du monde entier. Elles ont aussi longtemps monopolisé l’imaginaire collectif lié à ce pays. Il y a cette grande histoire marquée par la défaite de l'armée française à DiênBiên Phu en 1954 et la chute de Saigon qui marque la fin de la guerre américaine en 1975.
Derrière ces événements, il y a les destins, les parcours des Vietnamiens eux-mêmes qui ont posé leur valise ici : si la métropole a fait venir de la main-d'œuvre de son empire, réquisitionné des vietnamiens lors des conflits mondiaux, elle a aussi été une terre d’accueil pour des familles franco-vietnamiennes ou vietnamiennes assimilées par l’administration coloniale. Elle l’est aussi vingt ans plus tard, pour des boat people. Ce qui était, au départ, des destins directement liés à l’histoire coloniale qu’entretiennent la France et le Vietnam s’élargit avec l’arrivée de nouveaux compatriotes, réfugiés fuyant le Vietnam.
Que cette arrivée s’effectue de gré ou de force, l'immigration vietnamienne en France comme en Isère émaille tout le 20e siècle. Pour autant, elle reste mal connue bien qu’elle représente numériquement la deuxième plus importante immigration en provenance d’Asie dans l’hexagone.
Aujourd’hui, les derniers travailleurs indochinois réquisitionnés en 1940 et qui ont décidé de faire leur vie ici s'éteignent. Leurs noms rejoignent ceux d’autres anonymes venus lors de la Première Guerre mondiale.
En Isère, des noms de lieux sont associés à cette présence asiatique. Dans l’immédiate après Seconde Guerre mondiale, à Grenoble un camp à l'Ile Verte héberge des travailleurs indochinois. Ici, vont se côtoyer ce prolétariat indigène et leurs jeunes compatriotes issues de familles indochinoises aisées et envoyés en métropole pour poursuivre leurs études. Puis de 1975 aux années 1980, le Centre d’hébergement du Secours catholique à Cognin-les-Gorges, au pied du Vercors, va servir de porte d’entrée pour l’accueil de nouveaux Vietnamiens sur le territoire.
Malgré des origines sociales différentes, des rapprochements s’effectuent entre les multiples vagues d’immigrations : Derrière un embrassement des valeurs de la société d’accueil, s’expriment aussi des pratiques importées –autour notamment de l’alimentation, des fêtes, de la religion – qui fédèrent et font exister aujourd’hui auprès des étudiants, des immigrés vietnamiens et de leurs enfants une culture franco-vietnamienne.
L’équipe de Microphone est allée à la rencontre de Vietnamiens d’Isère et propose de mettre en partage des récits de cette installation.